Grignotage n°57: Entretien avec un vampire, Anne Rice

La chronique de Minidou m’a donné envie de relire ce roman, que j’avais adoré lors de ma première lecture.

Un journaliste s’apprête à faire une interview, mais il est loin de se douter de la véritable nature de son interlocuteur. Louis le vampire, âgé de plus de deux siècles, lui raconte sa vie de buveur de sang, la façon dont il a été créé et comment il n’a jamais pu se détacher véritablement de sa nature humaine. Son récit nous entraîne de la Nouvelle-Orléans, à Paris, en passant par la Transylvanie et l’Egypte.

J’avais décidé de relire ce livre en anglais, car je ne l’avais lu jusque là qu’en français. J’avais cependant pu apprécier la plume d’Anne Rice en VO dans la suite des Chroniques des Vampires: Lestat le vampire, La Reine des damnés, Le Voleur de Corps, Memnoch le démon et Armand le vampire.

L’écriture d’Anne Rice, même si elle ne pose pas de difficulté majeure, est assez dense, très élégante et recherchée. Le vocabulaire est précis, extrêmement riche et nuancé, et la façon dont le narrateur, Louis, raconte son histoire comporte de nombreuses métaphores, et des réflexions assez profondes qui font de ce récit une réflexion sur la vie, l’esthétique et la religion, entre autres.

Louis est un personnage touchant, même si j’ai tendance à lui préférer le caractère flamboyant et désespéré de Lestat, ou la philosophie et le calme d’Armand (mon chouchou parmi tous les vampires d’Anne Rice, demandez à Minidou, je passe mon temps à dire que je l’adore^^). Louis est intéressant pour son admiration des êtres humains, et pour son grand sens esthétique, mais je trouve sa personnalité assez faible. Il est subjugué par Lestat, devient « par hasard » un vampire, et subit plus ou moins les événements. C’est pourquoi la période durant laquelle il a quitté Lestat, mais pas encore rencontré Armand, et qui correspond à peu près au milieu du livre, m’a un peu ennuyée à la relecture. La relation Louis/ Claudia a beau être intéressante (même si le personnage de Claudia me met toujours assez mal à l’aise, je la trouve très bien décrite), cela ne suffit pas à remplir une centaine de pages.

Passé ce petit écueil, le reste de la narration et des tribulations de Louis est très plaisant à suivre, et comme à la première lecture, j’ai été fascinée par cette alliance entre personnages et style d’écriture, et par l’univers sombre, sensuel et mystérieux des vampires. L’avantage d’un personnage comme Louis, qui découvre peu à peu l’espèce à laquelle il appartient désormais, avec ses rituels et ses lois, c’est que le lecteur, qui n’en sait a priori pas plus que lui, s’identifie d’autant plus qu’il découvre les faits en même temps que le narrateur. Au niveau de la narration, certaines interventions du journaliste, qui ne peut s’empêcher de poser des questions, même si elles me semblent tout à fait logiques et crédibles, m’ont paru de trop, car elles interrompent la lecture et freinent la trame du récit.

Celui-ci, basé sur des souvenirs, nous entraîne de la naissance de Louis à l’état de vampire, à la Nouvelle-Orléans, au 18ème siècle, à Paris au 19ème, avant de revenir en Amérique au 20ème siècle. Le cadre historique et géographique est extrêmement bien rendu, même si le passage du temps n’est pas marqué précisément (on suit en cela la pensée du narrateur, pour qui le temps n’a pas la même valeur que pour les humains). J’aime particulièrement le moment où Louis et Claudia découvrent Paris.

Une grande attention est portée à la cohérence des personnages, qui sont chacun (on s’en rend compte notamment en lisant les livres consacrés à Lestat et Armand) modelés par leur passé et par le siècle durant lequel ils sont nés, et j’ai trouvé très intéressant les diverses réflexions de Louis et d’Armand sur l’esthétique, le passage du temps, le sens de la vie, même si celles sur la religion m’ont parfois laissée perplexe, parce que je n’étais pas assez documentée.

Ma relecture a donc confirmé mon premier avis : une très belle écriture, des personnages charismatiques, une vision des vampires à la fois originale et cohérente, et un récit envoûtant qui mêle souvenirs, action, et questionnements philosophiques.

Si je devais donner une note : 9/10

8 réponses à “Grignotage n°57: Entretien avec un vampire, Anne Rice

  1. Qu’est-ce que j’aime ces chroniques d’Anne Rice ! C’est quand même autre chose que les vampires qui fleurissent actuellement un peu partout…

  2. J’avais déjà pensé à le lire, n’ayant vu que le film jusqu’ici, et ayant parallèlement apprécié le style d’Anne Rice dans « Pandora ». J’essayerais de voir s’ils l’ont en français à ma bibliothèque.

  3. Pandora sera certainement ma prochaine lecture d’Anne Rice, le personnage m’intéresse beaucoup (d’autant que j’aime beaucoup Marius^^). Et effectivement, les vampires des Chroniques ont quand même plus d’envergure, je trouve, que la plupart des personnages de bit-lit que j’ai pu croiser^^ Mais après chacun ses goûts :p

  4. Mon coup de coeur 2010! (bon d’accord, pas le seul… mais un des plus marquants quand même ^^). Je crois que j’ai trouvé tellement de charme à ce livre que j’ai l’impression de ne pas pouvoir trouver de vampires aussi charismatiques dans les romans de bit-lit actuels ^^! Et puis moi j’aime Louis, juste parce qu’il est touchant :p! Même si c’est vrai qu’il passe son temps à se plaindre XD!

  5. C’est une série que j’ai très envie de découvrir. J’ai envie de « vrais » vampires. ce premier volume est dans ma LAL. Il ne me reste plus qu’à trouver le temps de l’acheter et de le lire…un jour!

  6. Bonne lecture, 100choses! :p

  7. Saint Epondyle

    Ce roman est le deuxième pilier du mythe du vampire ; juste après Dracula de Bram Stoker (ne serait-ce que par ordre chronologique). Alors que celui-ci nous apporte la dimension première du vampire, celle de la bête, du monstre, de la créature des ténèbres que l’on pourchasse avec des pieux et de l’eau bénite ; Anne Rice créé le vampire « civilisé », qui vit en parallèle de la société humaine. Paradoxalement, sa malédiction n’en est que plus terrible par comparaison avec le comte transylvanien cloîtré au bout du monde dans son château.

    Ceci dit, la lecture à proprement parlé de l’oeuvre (en VF) ne m’a pas autant accroché que ça. Malheureusement, j’ai trouvé qu’il y avait pas mal de longueurs, d’autant plus que les pensés de Louis n’évoluent pas vraiment avec le temps.

    Je voulais lire ce roman par attrait pour son côté fondateur, mais je ne suis pas certain d’avoir envie de relire Anne Rice. Dommage que cette histoire n’ait pas bénéficié d’une écriture à la Bram Stoker ou (puisqu’on est dans les comparaisons) à la Mary Shelley (Frankenstein).
    Enfin, le style contemplatif n’est pas moins valable qu’un autre.

  8. Et du coup tu me donnes envie de relire Frankenstein (mon premier livre entièrement en anglais… que de souvenirs… j’avais quand même pas mal souffert, mais maintenant ça devrait aller mieux^^).

    A propos d’Entretien avec un Vampire, le seul problème du livre pour moi, c’est Louis. C’est un type de personnage qui ne m’attire pas particulièrement, et je peux comprendre ton ressenti pour ce qui est des longueurs.

    J’ai largement préféré Lestat le Vampire, principalement à cause du personnage principal, mais aussi parce que dans l’ensemble, le décors change plus souvent, il se passe plus de choses, sans pour autant que le roman perde ce côté assez profond et très descriptif qui caractérise le premier tome…

    Je trouve les suites moins intéressantes, par contre, plus expérimentale, surtout Memnoch, où Anne Rice expose pendant 400 pages sa vision de la religion et de la théologie. Pour le coup, ça s’éloignait trop du thème principal et de ce que j’aimais dans les premiers volumes, j’ai eu du mal à le finir!

    Bref, fin du racontage de vie, de toute façon je veux les relire, donc je ne tarderai pas à les chroniquer!

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